Colloque

Villes et changements climatiques

Mon discours de clôture au colloque franco-québécois Villes et changements climatiques, le 28 octobre 2015 à Montréal. 

 

Permettez-moi de remercier tous les acteurs de ce colloque qui contribue à la vitalité des échanges franco-québécois. Je veux souligner l’activisme du réseau diplomatique français et la mobilisation de l’appareil étatique et territorial en vue de la réussite de la COP 21.

  

1. Des initiatives positives en France et au Québec

 

La France a une responsabilité particulière pour préserver la très riche biodiversité et les écosystèmes exceptionnels de son territoire, à l’instar des récifs coralliens et des forêts tropicales. 80% de la biodiversité française se trouve outre-mer. La France est le seul pays au monde à avoir sous sa protection des récifs coralliens dans trois des cinq océans du globe (Atlantique, Indien, Pacifique). Dans le monde, 60% des récifs coralliens sont menacés [Reef at Risk, WRI, 2011] « car les émissions de carbone ne transforment pas seulement l’atmosphère, mais bouleversent aussi le pH des océans. Or les coraux sont très sensibles à cette acidification » [Le Point 2242, 27 août 2015, p. 63]. Si nous ne faisons rien, ces récifs grouillants de vie auront disparu dans vingt ou cinquante ans. Depuis plus de dix ans, l’IFRECOR, l’initiative française pour les récifs coralliens, protège et gère durablement ce patrimoine naturel inestimable. Un kilomètre carré de récif corallien contient plus d’espèces animales et végétales que tout le littoral européen !

 

Ici au Québec, des initiatives salutaires ont été mises en place. Un certain volontarisme politique a permis que 90% de l’énergie produite au Québec soit propre, grâce à l’hydroélectricité. Un effort particulier a été engagé pour l’électrification des transports. En 2014, un marché du carbone a été mis en place avec la Californie et l’Ontario. Ce marché suscite aujourd’hui l’intérêt du Mexique. Cette année, le système de plafonnement et d’échange de droits d’émission de gaz à effet de serre (GES) couvrira 85% des émissions du Québec.  

  

2. Anticiper les changements et planifier des villes durables

 

Pour les décideurs du XXIe siècle, les bouleversements climatiques imposent de repenser les modèles décisionnels à l’aune de l’exigence de réduction drastique des GES, de la prévention et de la mitigation des effets – déjà ressentis - de ces bouleversements climatiques, sachant que des variations de température, même modérées, provoquent une recrudescence des phénomènes météorologiques violents (vagues de chaleur, tempêtes, ouragans, inondations…).

 

Dans ce contexte, « l’adaptation des villes à l’accroissement de l’intensité ou de la fréquence de certains aléas climatiques constitue donc un enjeu important pour l’avenir de nos sociétés » [Rapport annuel de l’Iddri, 2010]. L’enjeu est de concevoir des schémas d’aménagement durables, de limiter l’étalement urbain et de prévoir des espaces sanctuarisés pour la biodiversité, les principaux facteurs d’érosion de celle-ci étant la conversion des sols, la surexploitation, la pollution et les changements climatiques. Tandis que l’urbanisation anarchique gagne du terrain dans le monde et que l’aménagement de villes durables offrant des conditions de vie décentes à chacun est un enjeu majeur, les principes du développement durable et ceux de l’équité sociale doivent converger pour inventer un nouveau modèle urbain. 

 

3. Volonté politique et mobilisation citoyenne

 

Des mesures s’imposent : premièrement, supprimer les subventions publiques néfastes à l’environnement et à la biodiversité, celles qui favorisent les énergies fossiles, la pêche industrielle, l’étalement urbain, l’agriculture intensive, etc. ; deuxièmement, mettre en place de grandes infrastructures, notamment de transport collectif électrifié ; troisièmement, intégrer dans les politiques publiques des critères d’efficacité énergétique, de décarbonisation et de diversification énergétique.

 

Au-delà des acteurs publics, la mobilisation que nous appelons de nos vœux doit associer toutes les forces vives de la société : les ONG, les associations, les coopératives, les entreprises responsables, etc., pour mettre en place des solutions concrètes, opérationnelles et concertées sur les territoires. C’est en partenariat avec les populations locales que l’on mettra en œuvre les solutions les plus intelligentes et les mieux adaptées.

 

Vous le savez, je suis convaincu de l’impact positif des coopératives - le mouvement des SCOP en France - pour mettre en place une économie circulaire basée sur des circuits courts, une économie non-délocalisable et plus démocratique. Il faut convertir nos appareils productifs à l’économie circulaire, de sorte que le fonctionnement de l’économie rejoigne les exigences environnementales. Je veux saluer le rôle de la Coop Carbone au Québec qui offre des solutions aux entreprises pour maximiser leur efficacité énergétique.

 

4. A problème mondial, solutions mondiales

 

A l’échelle internationale, de grands projets de développement pourraient voir le jour, à l’exemple de l’ambitieux projet panafricain de muraille verte au Sahel. Le reboisement et l’agriculture durable permettraient de lutter contre la désertification. Des grandes réserves de biodiversité pourraient être crées sous l’égide des Nations-Unies. Une stratégie mondiale de préservation des pôles arctique et antarctique ferait l’objet d’une convention comme celle de Nagoya. En somme, il importe de faire feu de tout bois – sans produire de GES ! – pour empêcher la survenue d’un monde qui n’est pas souhaitable. Cet enjeu est tout à la fois local et global. Il est en tout cas crucial pour la qualité de vie et la santé des générations futures.

 

Un grand rendez-vous aura lieu à Paris en décembre, afin d’aboutir à un accord de réduction des GES qui sera, espérons-le, non seulement ambitieux mais aussi accompagné d’un vade-mecum de solutions concrètes. Chacun dans cette salle, vous êtes les ambassadeurs de cette conférence. Vous personnifiez, par votre présence, la nécessaire mobilisation des citoyens. Soyons des agents du changement. Alors, gens du pays, c’est votre tour d’agir. Aux arbres citoyens !