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Denise Bombardier : une relation difficile avec les francophones hors Québec

La disparition soudaine de Denise Bombardier, mardi matin, suscite des réactions empreintes de respect à l'extérieur du Québec, même si ses propos controversés des dernières années demeurent en mémoire.

 

Le moins qu'on puisse dire, c'est que les francophones hors Québec ont eu des relations tendues avec la journaliste et essayiste au cours de la dernière décennie.

 

Mme Bombardier, une personnalité médiatique incontournable au pays, aura fait réagir fortement les communautés du Canada français à la suite d'une série de déclarations sur sa perception de la francophonie canadienne.

 

Lors d’apparitions médiatiques, ses déclarations sur le déclin du français avaient fortement fait réagir. Culture de survivance, avait-elle déclaré en 2018 pour décrire ce qu’elle percevait comme un important et irréversible phénomène d'assimilation à l'extérieur du Québec.

 

À travers le Canada, toutes les communautés francophones ont à peu près disparu, avait-elle affirmé en 2018, soulevant l’ire de ces communautés soi-disant inexistantes.

 

Quelques semaines après cette controverse, elle avait également largement exagéré le déclin du français au Manitoba et omis l’existence de l’université francophone de Saint-Boniface, déclarant qu'à partir de [l’Ontario], jusqu’au Pacifique, il n’y a pas une université francophone.

 

La polémique avait mené au passage de Mme Bombardier dans plusieurs régions du pays à l’été 2019, dans le cadre d’un documentaire intitulé Denise au pays des Francos, à l'invitation d'une maison de production manitobaine.

 

Or des visites en Ontario, au Nouveau-Brunswick et au Manitoba, ainsi que des rencontres avec des Franco-Canadiens issus des communautés minoritaires ont conforté l’opinion de Denise Bombardier : Ce n’est pas parce qu’on parle une langue qu’on possède la culture de cette langue, a-t-elle dit à l'émission Tout le monde en parle en octobre 2019, critiquant au passage le chiac, le français parlé par les Acadiens.

 

Denise Bombardier est décédée mardi matin à l'âge de 82 ans, au terme d'une vie au cours de laquelle elle est restée fidèle à ses convictions.

 

Des réactions empreintes de respect

 

Dans la francophonie canadienne, les premières réactions témoignent du rôle marquant qu'a eu Denise Bombardier au fil de sa carrière.

 

La politologue franco-ontarienne Stéphanie Chouinard, qui avait accompagné Mme Bombardier dans la partie ontarienne de son périple au Canada en 2019, nous a fait part de son émotion d'apprendre le décès de Mme Bombardier. Elle se souvient de discussions sur la littérature et la culture franco-ontarienne, et d'une personne aimante, complètement gaga de sa petite-fille.

 

Elle a vanté son courage et sa ténacité, évoquant sa confrontation avec Gabriel Matzneff à l’émission Apostrophes. Elle a également rappelé son héritage de femme pionnière dans son domaine.

Elle avait du cran, à l’époque, de confronter un des géants de la littérature; cela lui a valu d’être persona non grata dans le milieu littéraire français. - Stéphanie Chouinard, politologue

 

 

 

De son côté, le président honoraire de Francophonie sans frontières, Benjamin Boutin, a rendu hommage à Denise Bombardier en soulignant son courage, son goût de l'érudition et son féminisme en acte, qui resteront dans les mémoires.

 

Carol Jolin, l'ancien président de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario, a salué la mémoire d’une journaliste très respectée qui avait le courage de ses opinions, et dieu sait qu’elle en avait des opinions.

 

Pour lui, le passage de Denise Bombardier à Tout le monde en parle en 2018 nous a donné une décharge électrique pour se manifester et dire : "On est là et on a des communautés qui bougent beaucoup, qui sont vibrantes, venez nous voir". Il regrette que l’ancienne journaliste ne soit pas revenue sur ses propos.